Interview voyageuse : Anaïs et son tour du monde en solitaire

Anaïs a 30 ans. En 2014, elle a effectué un tour du monde en solitaire de presque 10 mois à travers le Canada, les Etats-Unis, le Mexique, le Pérou, le Chili et l’Ile de Pâques, la Nouvelle-Zélande, la Thaïlande, le Cambodge, le Vietnam, et la Birmanie. Elle est rentrée début 2015 et nous parle aujourd’hui de son retour en France, de ses souvenirs de voyage, et de ses difficultés à gérer un budget ! Le tout avec une zénitude déconcertante !

Son itinéraire Zip World était le suivant : Paris – Montréal // Mexico – Lima // Santiago du Chili – Ile de Pâques – Auckland – Sydney – Bangkok // Yangon – Paris. Elle nous précise par ailleurs que Sydney est en réalité devenue une escale, son budget ne lui permettant finalement pas de visiter le pays, comme elle l’avait initialement prévu.

Salut Anaïs, peux-tu nous dire qui tu étais avant de partir en voyage ?
Avant de partir, j’étais assistante de direction dans un gros cabinet de conseil à Paris. Mes loisirs étaient variés, je m’éparpille facilement, et à Paris, il y a tellement de choses à faire : yoga, systema, squash, guitare, piano, chorale, voir des expos, des pièces de théâtre, aller au ciné, ou juste me promener dans Paris… Je n’étais pas réellement une grande voyageuse, j’ai les moyens de voyager que depuis assez récemment, je rattrape donc le temps perdu !

Anaïs et son anaconda, Amazonie
En Amazonie

Pourquoi avoir fait le choix de voyager seule ?
J’aime voyager seule. J’ai commencé il y a 3 ans en Ecosse, sans planning prédéfini, j’ai adoré ce sentiment de liberté. Et c’est difficile, je trouve, de trouver quelqu’un avec qui on peut voyager longtemps. J’avais cependant pensé chercher un compagnon de voyage à un moment, mais je me suis finalement rendue compte que c’était quelque chose que je devais faire seule. Une sorte de quête personnelle.

Comment t’est venue l’idée de ce tour du monde ?
Une de mes collègues m’a soufflé l’idée. Je me plaignais de ne pas être satisfaite de ma vie, sans avoir réellement de raison de me plaindre. Elle m’a conseillé de partir voyager quelques mois, de voir autre chose. C’était une excellente idée.

Anaïs à Bagan, Birmanie
Au Myanmar

Quelles sont pour toi les difficultés liées au fait que tu es une femme voyageant seule ?
Je n’ai pas vu de difficultés spécifiquement liées au fait d’être une femme voyageant seule. Je me suis souvent sentie dévisagée, bien sûr, en Amérique du Sud et en Asie lorsque je me retrouvais être la seule touriste, mais c’est peut-être tout aussi vrai pour un homme. J’ai eu beaucoup de chance, je ne me suis jamais sentie en insécurité. Tout s’est bien passé pour moi.

Quels sont, jusqu’à présent, tes plus beaux souvenirs de voyage et pourquoi ?
C’est une question difficile ! Je ne sais pas trop comment trier ou hiérarchiser mes souvenirs, c’est peut-être encore trop récent. Mais si je devais vraiment choisir, je dirais : Faire le tour de l’Ile de Pâques en 4×4 ; l’Amazonie et cette impression d’être hors du temps ; mon road trip en Nouvelle-Zélande, 10 000 kms en 2 mois, et je n’en ai pas vu assez ; Sukhothaï en Thaïlande au lever du soleil, les temples déserts et cette incroyable sensation de paix ; Noël sur la baie d’Halong avec une de mes amies…

Anaïs sur l'Ile de Pâques, Chili
Sur l’île de Pâques

As-tu des anecdotes de voyage à nous partager ?
Je me rappelle de cette après-midi en Nouvelle Zélande. J’avais roulé 5 ou 6 heures avant d’arriver à Kaikoura, qui est réputée pour ses bancs de phoques. Je m’étais garée à mon auberge de jeunesse puis j’étais partie faire une balade sur les falaises. Avant d’y monter, j’avais vu 3 ou 4 phoques, j’étais contente. Au bout d’une demi-heure de marche sur la falaise, je décide de m’asseoir sur l’herbe pour prendre mon goûter (ça creuse, de conduire !), et je me mets au bord de la falaise, face à un énorme rocher. Au bout de quelques instants, je me rends compte qu’il y a peut-être une centaine de tâches noires sur ce rocher. Je prends mon appareil photo, je zoome, et je m’aperçois que je suis face à environ 150 phoques. C’est à ce moment là que l’expression « banc de phoques » a pris tout son sens !

Plus intrigant, je me rappelle de ce trajet de nuit en bus entre Palenque et Oaxaca, au Mexique. J’étais dans un bus local, il y avait à côté de moi un homme et son petit garçon. Le bus s’arrête pour un contrôle par des militaires. Panique dans le bus, mon voisin cache quelque chose dans la grille d’aération du bus avant d’être embarqué à l’extérieur par les militaires. Finalement, lui et ses compagnons leur donnent une grosse somme d’argent pour pouvoir remonter. J’ai regretté à ce moment-là de ne pas mieux parler espagnol pour mieux comprendre ce qu’ils se disaient !

Une autre anecdote mexicaine : obligée de poireauter plusieurs heures à Campeche pour avoir mon bus pour Palenque, je négocie avec un chauffeur de taxi pour qu’il m’emmène voir le site d’Ezdna, à 50 kms de là. Nous nous mettons d’accord, nous partons, je vois le site, et sur le chemin du retour, mon chauffeur me propose d’aller faire l’amour sur la plage. Proposition que j’ai poliment déclinée. Sa déception fut grande, il parait que les Français ont la réputation de passer leur temps à boire et à faire l’amour. Je ne savais pas, je pense avoir cassé un mythe !

Anaïs à Teotihuacan, Mexique
Sur le site de Teotihuacan, Mexique

Quel était ton budget pour ce grand voyage ? 
Je n’ai pas vraiment fait de budget, je suis très mauvaise pour ça, ce qui explique probablement ma situation financière catastrophique à mon retour ! Je dirais entre 10.000 et 15.000 euros. Mais je n’ai pas économisé cette somme, j’ai fait un prêt personnel. Ce n’était pas forcément hypra raisonnable mais comme ce n’était pas un projet de longue date, je n’avais pas envie d’attendre 3 ans pour mettre des sous de côté pour le réaliser. Je n’ai donc pas vraiment de conseils à donner niveau économie. Par contre, si, comme moi, vous vous retrouvez en cours de route avec un budget explosé, je vous conseille de vous inscrire sur des sites de freelance. Je me suis inscrite sur Elance au bout de 6 mois de voyage, car je voyais que j’allais dans le mur, et en bossant 3 à 4 heures par jour, j’ai réussi à renflouer une partie du désastre.

As-tu des regrets quant à ton périple ?
Non, il n’y a pas de raison d’avoir de regrets. Il y a eu des changements imprévus, des pays que je n’ai pas pu visiter, comme l’Argentine ou l’Australie, faute de temps ou d’argent. Il y a donc eu des angoisses budgétaires. Mon sac était parfois trop lourd. Mais je n’ai aucun regret. C’était un voyage formidable, et il y en aura d’autres. Et j’aurai appris de mes erreurs.

Anaïs saute en parachute à Taupo, Nouvelle-Zélande
En Nouvelle-Zélande

Comment s’est passé ton retour en France ?
Je suis rentrée en France il y a 10 jours. Je ne réalise pas vraiment. J’envisageais mon retour sereinement, même s’il y avait des parts d’angoisse, bien sûr. Et finalement, ça se passe sereinement, même s’il y a des moments où je me sens un peu déconnectée. Je pense qu’il faut un peu de temps pour que les choses se remettent en place. Je suis dans une situation inédite pour moi. Je n’ai pas repris le boulot mais je ne suis pas vraiment en vacances car j’ai un milliard de choses à faire et de gens à voir. Je suis chez des amis en attendant de trouver un appartement, et mes affaires sont éparpillées dans tout Paris… Je n’ai pas encore eu le temps de vraiment me poser et d’y réfléchir. Je reprends mon travail dans 10 jours – j’avais pris un congé sabbatique – et mes finances désastreuses (ai-je spécifié à quel point je suis mauvaise avec un budget ?!) ne me donnent pas beaucoup d’options. Mais je suis en paix avec ça. On verra ce que l’avenir m’apporte. Voyager aussi longtemps est une bonne leçon, je trouve. On apprend que les plans peuvent changer radicalement, et que beaucoup de choses peuvent se passer. C’est la même chose dans la vie de tous les jours, il faut peut-être être juste un peu plus attentif quant aux opportunités qui se présentent.

Quelle philosophie ! As-tu l’impression que ce voyage t’a changée ?
Oui, et heureusement, c’était le but ! Je suis beaucoup plus sereine, je me suis prouvée que je pouvais me débrouiller dans quasi n’importe quelle situation. Je suis plus sociable, plus à l’écoute de moi-même et de ce que je veux. Plus équilibrée, je pense.

Selfie d'Anaïs à San Pedro de Atacama, Chili
A San Pedro de Atacama, Chili

As-tu souffert de la solitude ? 
Non, pas vraiment. Je ne suis pas extravertie de nature, donc être seule ne m’a pas posé de problème, et il y avait quasiment toujours des gens autour si je me sentais d’humeur sociable. Après, bien sûr, il y a des moments où on déprime un peu, où on est fatiguée, où on a eu une sale journée, et dans ces moments-là, je pouvais me sentir un peu seule, parfois. Mais je pense que c’est aussi vrai dans une vie « normale » qu’en voyage.

Quels sont les avantages au voyage en solitaire ?
Il y a beaucoup d’avantages : être libre de suivre ses envies, ses lubies ; être libre de changer d’avis, même 5 fois par jour ; être plus ouvert aux autres ; apprendre sur soi ; se dépasser en permanence, car il n’y a personne derrière qui se réfugier…

Quels ont été les objets indispensables de ton sac à dos ?
– Ma couverture de voyage. Je l’avais acheté sur un coup de tête au dernier moment, en me disant que je serai contente de l’avoir en avion ou dans le train. Au final, je m’en suis servie tout le temps, dans les transports, dans les chambres pas toujours chauffées, comme plaid ou comme châle.
– Mon ebook et mon mp3, qui m’ont permis de survivre aux longs trajets de bus, train, bateau ou avion…
– Mon appareil photo. Je pense avoir progressé, à force de prendre des photos tous les jours ! Et j’aimerais bien prendre des cours, maintenant.
– Mon petit ordi, qui m’a permis de rester en contact avec mes proches et de bosser à distance quand j’en avais besoin.
J’ai bien conscience que ça fait très geek, tout ça, mais tout le reste, au final, on peut le trouver sur place.

Anaïs au Machu Picchu, Pérou
Au Machu Picchu, Pérou

Un conseil à donner aux voyageurs se lançant seuls ?
N’hésitez pas ! C’est tellement enrichissant de voyager seul(e), étrangement. On est beaucoup plus attentif aux autres et à soi-même. Plus attentif aux lieux, aux atmosphères. Et au pire, si vous n’aimez vraiment pas être seul(e), il y a des gens partout, vraiment, et faire connaissance est extrêmement facile (et c’est quelqu’un qui n’est pas très doué pour ça qui vous le dit !).

Quelque chose d’autre à ajouter ? 
Cette citation d’Henry de Monfreid : « N’ayez jamais peur de la vie, n’ayez jamais peur de l’aventure, faites confiance au hasard, à la chance, à la destinée. Partez, allez conquérir d’autres espaces, d’autres espérances. Le reste vous sera donné de surcroît. « 

Le blog d’Anaïs autour du monde : http://traveltheworldwithmeblog.wordpress.com

Ce contenu a été vérifié et mis à jour le 14 novembre 2023.

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